Le SPJ a adressé le message de prudence ci-dessous aux policiers dont des collègues se voient lourdement condamnés pour des dépassements de vitesse lors d’interventions urgentes. Les policiers ne sont pas des fous du volant qui demandent un blanc-seing pour jouer avec la vie des usagers de la route. Ils sont des professionnels engagés, responsables et formés, qui interviennent avec célérité pour mieux vous servir et vous protéger. Si vous estimez que les membres des services d’urgence doivent pouvoir intervenir rapidement sans avoir à subir des sanctions disproportionnées, vous avez tous votre mot à dire : changez la loi.
« Chers amis, chers membres, estimés collègues,
Chaque jour, chaque nuit, nous sillonnons inlassablement les rues de notre cité et les routes de notre canton pour mieux les sécuriser. Pour prévenir les crimes et délits. Et quand cela s’avère nécessaire, pour intervenir avec la célérité indispensable à la protection des personnes et des biens.
Attaque à l’explosif de distributeurs automatiques de billets. Braqueurs «qui s’arrachent» précipitamment. Cambrioleurs qui prennent la fuite. Auteurs d’infractions qui tentent de se soustraire à leur interpellation. Surveillances quotidiennes de délinquants sériels. Filatures de truands aguerris dans le cadre d’enquêtes d’envergure.
Chacune et chacun d’entre nous peut être amené à se lancer dans une course urgente et une conduite rapide. L’État le sait, puisqu’il nous y prépare au moyen de formations diverses.
Mais la mise en application aveugle de Via Sicura donne une dimension schizophrénique à nos missions. Aujourd’hui, elle nous contraint surtout à repenser, temporairement au moins, notre façon d’intervenir.
En effet, quand notre rapidité d’intervention permet d’empêcher que ne soit commis un crime, et d’en arrêter les auteurs, nous avons droit à des félicitations.
Mais malheur à nous quand, pour le même résultat, le flash d’un radar a crépité sur notre passage.
Car cette même vitesse d’intervention, qualité qui faisait de nous des policiers reconnus par leurs pairs, nous transforme aussitôt en chauffards prévenus.
En voulant au mieux servir et protéger, et en cherchant à faire respecter la loi, nous nous exposons à cette dernière. Les risques sont importants : mesures disciplinaires, suspensions de notre activité professionnelle, retraits de permis, condamnations lourdes. Révocation parfois, même.
Trop de policiers en savent malheureusement quelque chose, puisqu’ils font l’objet de procédures internes, ainsi que de poursuites pénales et administratives. Trop de femmes et hommes qui croyaient faire leur devoir et qui se retrouvent du jour au lendemain seuls, sans soutien, broyés par les accusations et les sanctions, plongés dans le désarroi et les difficultés.
Leurs histoires nous affligent et nous font peur. Peur de faire notre devoir. Peur de prendre le volant. Peur d’intervenir.
Cela semble à ce point incohérent et choquant que des personnalités politiques s’indignent et souhaitent faire en sorte que la LCR soit modifiée. Qu’elles en soient remerciées. Sachez que votre Comité s’est mis à leur disposition afin de mettre un terme à cette situation insupportable.
Nous vous savons profondément attachés à la Mission et à votre engagement sans faille au service de la population. Nous partageons ces valeurs qui faisaient jusqu’ici vos succès quotidiens et dont vous pouvez être fiers. Mais ce service ne doit plus être assuré à n’importe quel prix. Vous protéger et préserver vos intérêts, c’est cela, notre priorité.
Or, force est de constater que l’Etat ne garantit plus la protection nécessaire à l’accomplissement de vos missions si particulières.
Ces ô combien précieuses secondes qui peuvent faire toute la différence justifient-elles les dommages que vous devez subir par la suite ? Assurément pas.
Alors aussi longtemps qu’une solution n’aura pas été trouvée à cette situation insensée, et que la déraison l’emportera, nous ne pouvons que vous encourager à ne plus prendre de risques, et à respecter désormais scrupuleusement le code de la route. Ce, quel que soit le degré d’urgence de vos interventions, et aussi contre nature que cela puisse vous paraître.
Nous sommes bien évidemment conscients qu’un respect strict de la LCR est susceptible d’entrainer l’échec de certaines de vos missions. Mais personne ne peut exiger de vous que vous enfreigniez une loi, et que vous en assumiez ensuite les lourdes et douloureuses conséquences. Le cas échéant, il faudra absolument signaler par écrit ces éventuels échecs à votre hiérarchie ainsi qu’au Ministère Public.
En revanche, sachez que votre Comité ne cautionnera aucun refus de policiers de prendre le volant ou d’assurer leurs missions. Nous avons prêté serment et nous devons continuer à garantir autant que faire se peut le service à la population. Assurons-nous désormais de le faire dans les limites strictes fixées par la loi.
Nous vous remercions pour votre confiance.
Votre Comité »