En novembre passé, après plus de 4 ans de travaux, de débats et d’auditions, puis le dépôt d’un rapport de 300 pages, les députés du Grand Conseil ont voté à une écrasante majorité une réforme en profondeur de la LPol, une loi qui jusque-là a hélas sévèrement abimé ce service public essentiel qu’est la police.
Monsieur le Conseiller d’Etat Mauro Poggia et la Direction de la police avaient pourtant tout tenté pour empêcher ce vote, en vain.
Car la nouvelle loi exige, notamment, la création d’un nouveau corps de Gendarmerie qui se veut homogène et cohérent , en opposition aux anciens silos hermétiques. Une gendarmerie qui pourra effectuer toutes ses tâches régaliennes, et garantir des effectifs de terrain suffisants pour exercer la mission au service de la population.
L’esprit de la loi impose également la réduction du nombre d’officiers, multiplié par l’ancienne LPol à la manière d’une «armée mexicaine», pour offrir en lieu et place un commandement moderne, efficace et pragmatique.
La nouvelle loi prévoit en outre de mette fin à une formation délocalisée, au contenu immuable et inadapté, au profit d’une formation à Genève, sous la conduite de policiers genevois, afin de correspondre aux réalités et spécificités de notre canton, et de répondre au mieux aux exigences opérationnelles de notre Police ainsi qu’aux besoins de nos citoyens.
Pourtant, en dépit de ce vote pour beaucoup porteur d’espoirs, les syndicats se sont montrés prudents; car tout portait à croire que le DSPS de Monsieur Mauro Poggia et la direction de la police tenteraient de s’opposer à la mise en œuvre de la nouvelle loi.
Une Direction de la police qui est d’ailleurs restée muette après le vote, comme dans un déni, refusant de communiquer au personnel qui se demandait pourtant comment la transition allait s’opérer et surtout comment la volonté du Législateur allait se concrétiser.
Il a ensuite été rapporté aux syndicats de police que lors d’un rapport d’Etat-Major, Monsieur le Conseiller d’Etat Mauro Poggia a invité la Direction de la police à ne pas mettre en œuvre la nouvelle loi.
Puis, ce sont des hauts gradés qui ont été entendus fanfaronner et dire que le vote n’allait rien changer à l’organisation de l’Institution ni à son fonctionnement.
La crainte des syndicats s’est finalement confirmée, puisque le 21 décembre 2022, le Conseil d’Etat a décidé d’adopter – sans aucune consultation préalable des associations du personnel – la nouvelle version du Règlement sur l’organisation de la police (ROPol – F 1 05.01); un règlement qui maintient la division de la Gendarmerie par missions, de même que sa cohorte de hauts gradés, et qui ne fait par ailleurs aucunement mention du retour de la formation à Genève.
Comme le prédisaient ces hauts gradés d’un air nargueur, en effet, rien ne changera sur la base d’un tel règlement, si ce n’est la terminologie.
En réalité, ce règlement n’a d’autres objectifs, pour ceux qui l’ont conçu, que de préserver les silos et leur caste de hauts gradés par un simple changement d’appellation, et d’éluder le retour de la formation à Genève.
C’est un refus pur et simple de se conformer à la loi et de l’appliquer.
En adoptant ainsi un règlement qui trahit sans équivoque l’esprit du texte voté par le Parlement, et qui va donc à l’encontre de ce dernier, le Conseil d’Etat a délibérément pris le parti de défier le Législatif, de se moquer des institutions, et de se mettre hors-la-loi.
C’est choquant, grave et intolérable.
C’est surtout indigne d’un exécutif qui prend le risque de plonger la police dans une crise sans précédent.
S’ils s’apprêtent à déposer un recours auprès de la Chambre Constitutionnelle de la Cour de Justice, les syndicats de police exhortent également la Députation à rappeler au Conseil d’Etat avec la plus grande fermeté, que son travail est d’appliquer les lois votées par le Grand Conseil, et non de les contourner, de les travestir ou encore de les enfreindre; et à le sommer de travailler sérieusement sur un nouveau règlement et ce, tant dans le respect de la réforme voulue par le Législateur que du délai que ce dernier lui a imparti.
Il en va de l’intérêt public et du respect de la séparation des pouvoirs.
Les syndicats de police